En contrebas de la « tour des Conti », seul vestige d’un château d’origine médiévale disparu en 1751 à la suite d’un incendie et possédé, notamment, par le connétable Anne de Montmorency, le prince Louis de Bourbon puis le prince de Conti, l’église Saint-Lucien est un vaste édifice à l’histoire architecturale complexe et passionnante.
Une église existait déjà au 11ème siècle – le vocable saint Lucien atteste toujours une origine fort ancienne – dont subsiste, totalement dissimulé dans les combles, un clocher roman. Son premier étage est ajouré sur chaque face de deux baies géminées en plein cintre soulignées par des colonnettes et un cordon de billettes comme dans de nombreux clochers contemporains du Vexin (Reilly, Bouconvillers…) ou du Valois (Pontpoint, Rhuis…). Le second étage, transformé par la suite, comprenait une seule baie en plein cintre, recoupée par une colonnette, sur chaque côté. Il est plus que probable que la nef d’alors s’élevait à l’emplacement du vaisseau central de la nef actuelle.
Au début du 13ème siècle, un chœur de deux travées à chevet plat sera bâti à l’emplacement du chœur primitif. Masqué latéralement par des constructions postérieures, il offre à l’extérieur la magnifique architecture de son haut chevet, percé d’un triplet de fenêtres dont les piédroits sont soulignés par de fines colonnettes en délit. Latéralement, une fenêtre composée de deux lancettes surmontées d’un important oculus occupe toute la largeur de chaque travée. Seule celle située au sud de la seconde travée est aujourd’hui ouverte sur l’extérieur. Ces fenêtres sont intéressantes en tant qu’exemple précoce d’un type de fenêtre appelé à régner sans partage dans l’architecture gothique à partir des années 1200 : la fenêtre composée, qui deviendra très vite la fenêtre-châssis. A l’intérieur, ogives, doubleaux et formerets – tous finement moulurés – des deux voûtes retombent sur des colonnettes en délit par l’intermédiaire de chapiteaux à crochets. Au nord, un groupe de trois chapiteaux est sculpté avec une exceptionnelle virtuosité de chimères dont les pattes prennent appui sur les crochets.
L’église va connaître fin 14ème ou début 15ème siècle une première altération de son plan, jusque là assez simple et symétrique, avec l’édification d’une chapelle au nord du chœur. Assez surbaissées, les voûtes comportent des ogives à profil déjà prismatique et le réseau – seul conservé – de la fenêtre nord associe deux lancettes flamboyantes à un oculus polylobé encore rayonnant. Compte tenu de son emplacement, cette chapelle avait probablement un usage seigneurial.
Mais c’est le 16ème siècle qui va bouleverser encore davantage, en deux temps, le plan de l’église. Vers le milieu du siècle, tout d’abord, la nef est dotée d’un bas-côté au sud, que prolongent vers l’est deux autres travées, l’ensemble mélangeant des éléments de style gothique tardif et de la Renaissance. La communication avec la nef se fait par six arcades brisées retombant sur des piles circulaires par l’intermédiaire de chapiteaux dont trois sont décorés d’une frise sculptée de feuillages. La voûte de la dernière travée du bas-côté, avec liernes, tiercerons et clefs pendantes très ouvragées est particulièrement remarquable.
Le bas-côté nord sera construit dans un second temps, cette fois dans le style de la Renaissance. Non voûté, sauf à sa dernière travée et à celle qui lui fait suite au droit de la base du clocher, il comporte des arcades en plein cintre et des chapiteaux doriques.
Saint-Lucien possède un riche mobilier, au premier rang duquel il faut mentionner une superbe Mise au Tombeau du 16ème siècle. Il faut également signaler, parmi les statues, une sainte Marguerite, une sainte Anne, une Vierge à l’Enfant, une Piéta. Le banc d’œuvre possède un remarquable dossier en bois sculpté du 18ème siècle et la tribune comporte un petit orgue du 19ème siècle (2004).
Chronologie :
Points d'intérêt :
Galerie :
Bibliographie :
- Louis GRAVES, Précis statistique sur le canton de Méru, arrondissement de Beauvais (Oise), Beauvais, Achille Desjardins, 1837.
- Dominique VERMAND, Eglises de l’Oise. Territoire des Sablons (Méru). Vexin et Pays de Thelle, Comité Départemental du Tourisme de l’Oise et Communauté de Communes des Sablons, 2004, in-8° de 32 p., p. 20-22 (voir texte ci-dessus).
Sites internet :
Documents :
- Extrait de Eugène WOILLEZ, Archéologie des monuments religieux de l’ancien Beauvaisis pendant la métamorphose romane, Paris, 1839-1849 : APPENDICE. PL. VII.
- Extrait de Alphonse de CAYEUX, Charles NODIER et Justin TAYLOR, Voyages pittoresques et romantiques dans l’ancienne France, Picardie, vol. 3, Paris, 1845.