Désaffectée à la suite de la Révolution, la chapelle royale Saint-Frambourg devait connaître bien des vicissitudes jusqu’à son acquisition en 1973 par le pianiste hongrois Georges Cziffra. Une restauration aussitôt entreprise, accompagnée de fouilles archéologiques, allait aboutir à une véritable résurrection de l’édifice quatre ans plus tard. La pose d’une nouvelle toiture dans l’esprit de l’originale, en 2001-2002, a permis à l’église de retrouver sa silhouette médiévale, à laquelle fait seulement défaut le clocher, bâti au nord de la première travée et dont ne restent que quelques maigres vestiges.
La fondation de la chapelle royale Saint-Frambourg est due à la reine Adélaïde, épouse de Hugues Capet, et remonte à l’extrême fin du 10ème siècle. Celle-ci la dote généreusement – douze clercs y sont attachés – et lui procure de très nombreuses reliques, dont celles de saint Frambourg, transférées de Saint-Frambault de Lassay, dans le Maine, pour la circonstance.
Les fouilles effectuées sous l’édifice actuel ont permis de retrouver d’importants vestiges de la construction d’Adélaïde, sur laquelle de nombreuses interrogations subsistent cependant. Cette première chapelle, bâtie exactement dans l’axe d’une tour de l’enceinte gallo-romaine arasée lors de la construction de l’édifice actuel, comprenait trois vaisseaux séparés par deux files de quatre colonnes et se terminait par un chevet plat jouxtant la face interne de la tour. Deux pilastres, dans le prolongement des colonnes, ont conservé de rares fresques contemporaines de cette première construction et représentant des personnages en habits épiscopaux. La partie occidentale, assez complexe, était dotée d’annexes. Crypte d’un édifice dont le niveau supérieur aurait utilisé la tour gallo-romaine comme abside (d’autres exemples d’une telle utilisation existent à Senlis) ou bien chapelle à un seul niveau simplement adossée à la tour, l’interrogation demeure.
L’édifice actuel est une reconstruction du dernier quart du 12ème siècle pour l’essentiel. Très simple, le plan comprend une nef unique de quatre travées, couvertes de voûtes sexpartites, et un chevet composé d’une courte travée droite et d’une abside en hémicycle, couverts par une unique voûte à huit compartiments. Ce chevet déborde la muraille gallo-romaine vers l’est et enveloppe complètement la tour qui servait d’appui – et peut-être d’abside – à l’église d’Adélaïde. Un clocher dont il ne reste que des arrachements s’élevait au nord de la première travée. Des éléments sculptés de ce clocher ainsi que des chapiteaux de la nef ont été réutilisés au 19ème siècle dans la petite chapelle de la Bellefontaine, construite dans une propriété privée à la sortie sud-ouest de Senlis.
Malgré sa simplicité, Saint-Frambourg doit être considéré comme un authentique chef d’oeuvre de l’architecture gothique du 12ème siècle en raison de la perfection des proportions et de l’exécution de son espace intérieur, d’une parfaite unité et d’une très grande monumentalité. L’originalité vient ici du traitement très plat des murs latéraux, où aucun effet d’alternance n’est perceptible malgré l’emploi de voûtes sexpartites. Trois colonnettes sont systématiquement associées aux retombées des voûtes alors que la logique du système en réclamerait cinq aux temps forts de celles-ci (deux pour les formerets, deux pour les ogives et une pour le doubleau) et trois aux temps faibles (deux pour les formerets et une pour l’ogive intermédiaire) Ce résultat est obtenu en arrêtant les formerets du temps fort au tailloir des chapiteaux.
Cette absence d’alternance inscrit directement Saint-Frambourg dans le sillage de Notre-Dame de Paris, dont la construction est alors bien avancée, et non, paradoxalement, dans celui de la cathédrale toute proche où l’effet d’alternance est, au contraire, très marqué. La première travée et la façade ne seront achevées que dans les années 1230, après une interruption des travaux.
A l’extérieur, on remarquera surtout l’immense rose (9 m de diamètre) ajourée d’un simple triplet de fenêtres qui remplace un remplage dont on ne sait s’il fut réalisé et le puissant volume de l’abside, semblable à un ouvrage de défense. Enfin, on ne saurait passer sous silence les dix vitraux réalisés en 1977 et 1987 d’après des cartons de Joan Miro et qui ornent le triplet de la façade et les fenêtres de l’abside (2002).
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Bibliographie :
- Louis GRAVES, Précis statistique sur le canton de Senlis, arrondissement de Senlis (Oise), Beauvais, Achille Desjardins, 1841.
- Abbé Eugène MÜLLER, "Essai d'une monographie des Rues, Places et Monuments de Senlis", Comité Archéologique de Senlis, Comptes-Rendus et Mémoires, 1881, p. 159-172.
- Eugène LEFEVRE-PONTALIS, Congrès archéologique de France, 72ème session, Beauvais, 1905, Société française d’archéologie, Paris et Caen, 1906, p. 101-103.
- Nicole BIANCHINA, "Saint-Frambourg de Senlis. Etude historique et archéologique", Revue archéologique de l'Oise, N° 20, 1980, p. 5-16.
- Nicole BIANCHINA, "Saint-Frambourg de Senlis, 2ème partie : l'édifice gothique", N° 22, 1981, p. 13-31.
- Marc DURAND, "Sondages entrepris dans la chapelle basse de la collégiale Saint-Frambourg de Senlis en 1996", Société d'Histoire et d'Archéologie de Senlis, Comptes-rendus et Mémoires, 1995-1997, p. 155-164.
- Jean-Louis BERNARD, "Recherches et travaux archéologiques récents dans Senlis", Société d'Histoire et d'Archéologie de Senlis, Comptes-rendus et Mémoires, 2000-2001, p. 142-146.
- Marc DURAND, "Les recherches archéologiques dans l'ancienne collégiale Saint-Frambourg à Senlis (Oise)", Société d'Histoire et d'Archéologie de Senlis, Comptes-rendus et Mémoires, 2010-2011, p. 25-47.