Une des plus belles de cette vallée de l’Oise si riche en monuments de premier ordre, l’église Saint-Paul juxtapose une nef romane au riche décor sculpté à un vaste ensemble transept/chœur à chevet plat du premier quart du 13ème siècle. Un haut clocher latéral de la même époque domine l’ensemble.
Bâtie vers 1125-30, la nef, avec ses six travées flanquées de bas-côtés, continue la longue tradition des églises basilicales non voûtées cependant que ses arcades brisées à double ressauts et le décor de ses chapiteaux – entrelacs de tiges, volutes, feuilles et fruits d’armoires – annoncent la génération des premières églises voûtées sur croisées d’ogives qui, avec Bury, Cambronne-les-Clermont, Saint-Vaast-les-Mello…, marque le renouveau architectural du milieu du 12ème siècle. Un arc diaphragme reliait autrefois les murs gouttereaux de la nef entre les troisième et quatrième travées, comme en témoignent les deux colonnes engagées, surmontées de chapiteaux, présentes à cet endroit et deux arcs semblables dans les bas-côtés.
A la façade ouest, se remarque un profond portail à gâble, le plus achevé de ce type dans la région. Les nombreuses voussures en plein cintre s’ornent de bâtons brisés et d’une frette crénelée. Les murs des bas-côtés sont terminés par une corniche beauvaisine vigoureusement sculptée. Une autre corniche, au très original décor de petits personnages allongés, de têtes grimaçantes, d’animaux fantastiques, faisant curieusement songer à l’art africain et vraisemblablement d’origine celtique, couronne les murs de la nef.
La présence concomitante de bâtons brisés et d’une frette crénelée au portail, d’arcs-diaphragme, d’un chapiteau à godrons, voir d’une corniche beauvaisine relève incontestablement d’une influence normande.
Beaucoup plus élevé que la nef, l’ensemble formé par le transept et le chœur accompagné de ses chapelles se présente comme une double nef transversale s’inscrivant dans un volume rectangulaire très saillant, précurseur pour la région du type du choeur-halle qui connaîtra un certain succès par la suite et dont, tout à côté, Nogent-sur-Oise offre un magnifique exemple. On remarquera tout particulièrement l’élégante pile quadrilobée recevant les voûtes des chapelles du bras sud du transept ainsi que les sobres fenêtres, composées de deux ou trois lancettes surmontées de roses à quatre ou six lobes. Tout ici évoque l’équilibre et la mesure de l’architecture gothique arrivée à maturité. Suivant une disposition très fréquente en Soissonnais et qui se retrouve à Nogent-sur-Oise, le chœur se termine par une niche large et peu profonde qu’encadre un arc brisé, qui abritait primitivement l’autel principal.
Campé à l’angle nord-est du chœur, le clocher attire l’attention par ses longues baies jumelles en tiers-point ouvertes sur chaque face et par son toit en bâtiere cantonné de clochetons d’angle à six pans garnis d’écailles, réminiscence des petites pyramides accompagnant les flèches romanes du Valois et du Vexin (1978, modifié 2015).
Chronologie :
Points d'intérêt :
Galerie :
Bibliographie :
- Louis GRAVES, Précis statistique sur le canton de Creil, arrondissement de Senlis (Oise), Beauvais, Achille Desjardins, 1828.
- Eugène WOILLEZ, Archéologie des monuments religieux de l'ancien Beauvaisis pendant la métamorphose romane, Paris, 1839-1849, p. V 1-2 et planches hors texte.
- Eugène LEFEVRE-PONTALIS, « Monographie de l’église de Villers-Saint-Paul », Mémoires de la Société Académique d’Archéologie, Sciences et Arts du Département de l’Oise, t. 13, 1886-1888, p. 182-197.
- Chanoine L. PIHAN, Esquisse descriptive des monuments historiques dans l’Oise, Beauvais, 1889, p. 473-487.
- Abbé Eugène MÜLLER, "Excursion du Comité Archéologique de Senlis", Comité archéologique de Senlis, Comptes-rendus et Mémoires, 1891, p. L-LI.
- Abbé Eugène MÜLLER, Senlis et ses environs, Senlis, 1894, p. 264-268.
- Eugène LEFEVRE-PONTALIS, Congrès archéologique de France, 72ème session, Beauvais, 1905, Société française d’archéologie, Paris et Caen, 1906, p. 113-117.
- Lucien CHARTON, Liancourt et sa région, Liancourt, 1969, p. 379-395.
- Michèle BAUDRILLARD-STEINMETZ, Le chevet de l’église de Villers-Saint-Paul (Oise), Mémoire de maîtrise de l’Université de Paris IV-Sorbonne, 1973.
- Dominique VERMAND, Eglises de l’Oise, I, Nouvelles Editions Latines, 1978, in-8° de 34 p., p. 30-31 (voir texte ci-dessus).
- Anne PRACHE, Ile-de-France romane, Zodiaque, La nuit des temps 60, 1983, p. 203-205.
- Claudine LAUTIER et Maryse BIDEAULT, Ile-de-France gothique, Paris, 1987, p. 395-402.
- Erika RINK et Nikolaus BRADE, Kirchenschicksale in Nordfrankreich/Destins d'églises en Picardie, Ernst A. Chemnitz/Mitteldeutscher Verlag, 2006, p. 18-19.
Sites internet :
Documents :
- Extrait de Eugène WOILLEZ, Archéologie des monuments religieux de l’ancien Beauvaisis pendant la métamorphose romane, Paris, 1839-1849 : VILLERS-SAINT-PAUL. PL I à VI.
- Extrait de Arthur MÄKELT, Mittelalterliche Landkirchen aus dem Entstehungsgebeite des Gotik, Leipzig, réimpression de l’édition originale de 1906, p. 61-63.