Comme Saint-Antoine, la paroisse Saint-Jacques a été créée tardivement (1199) pour répondre au développement rapide de la ville autour des pôles formés par le palais royal et l’abbaye Saint-Corneille. C’est une trentaine d’années plus tard que fut commencée la construction de l’église actuelle, édifice imposant que domine une haute tour de la fin du gothique et dont les indéniables qualités architecturales comme la richesse de son mobilier mériteraient d’être mieux connues.
Longue de 51 mètres, l’église comprend une nef de six travées avec bas-côtés et chapelles établies postérieurement entre les contreforts, un transept autrefois débordant et une abside qu’entoure un large déambulatoire plus tardif dont le plan très irrégulier est à mettre en relation avec le milieu urbain très dense qui existait lorsqu’il fut construit. Une haute tour est bâtie pratiquement en hors oeuvre à l’ouest du bas-côté nord. Comme bien souvent, ce plan reflète les vicissitudes qui ont jalonné l’histoire de l’édifice, inachevé lorsque survint la Guerre de Cent Ans et objet de nombreux ajouts, modifications et restaurations ensuite. Si le style gothique tardif domine à l’extérieur, l’église n’en est pas moins, pour l’essentiel, une construction du 13ème siècle, réalisée en trois campagnes principales de 1230 (choeur et transept) à 1270 environ (travées ouest de la nef).
Le choeur et le transept du 13ème siècle
Profondément modifié par la construction du déambulatoire au 16ème siècle et un riche habillage de marbres en 1767-68, le choeur comprenait simplement une courte travée droite et une abside à sept pans. Il était éclairé par trois étages de fenêtres. Celles du premier niveau ont disparu au profit des arcades qui communiquent avec le déambulatoire. Les fenêtres du second niveau s’ouvrent derrière les arcatures du triforium, exemple précoce du triforium ajouré qui connaîtra un grand succès dans la période dite rayonnante de l’architecture gothique.
Dans ses dispositions premières, cette abside est à rapprocher de plusieurs réalisations du début du 13ème siècle comme Saint-Léger de Soissons et Saint-Yved de Braine, dans l’Aisne, ou encore La Chapelle-sur-Crécy et Vaudoy-en-Brie, en Seine-et-Marne. Les bras du transept, dont les deux niveaux supérieurs continuent l’élévation du choeur, présentent la particularité d’être couverts chacun d’une voûte sexpartite (c’est-à-dire à six compartiments), un type courant durant la seconde moitié du 12ème siècle mais dont l’usage a pratiquement disparu à l’époque de la construction de Saint-Jacques. Les grandes baies de style rayonnant qui ajourent le mur de fond de chacun de ces croisillons sont une invention du 19ème siècle.
La nef du 13ème siècle
Construite d’est en ouest entre 1240 et 1270 environ, la nef ne reçut ses voûtes que sous Louis XI, en 1476-1477. Malgré des qualités indéniables, les boiseries du 18ème siècle qui habillent les piliers ne permettent plus d’apprécier à sa juste valeur la belle architecture de cette nef, à la fois sobre et raffinée. Visibles seulement en partie haute, les piliers sont remarquables de minceur, le noyau central ayant pratiquement disparu au profit des demi-colonnes associées à la retombée des arcades et des voûtes. On observera tout particulièrement l’unique chapiteau à tailloir en étoile qui, vers le bas-côté, reçoit ogives, doubleau et formerets, tous de même importance et de profil identique. A la même époque, l’extraordinaire église abbatiale de Saint-Martin-aux-Bois, au nord-ouest de Compiègne, en proposera une variante encore plus aboutie et raffinée. Au-dessus des grandes arcades, les parties hautes sont traitées avec une grande sobriété : étage intermédiaire ajouré simplement de deux lancettes donnant sur les combles et étage supérieur – de la fin du 15ème siècle – assez court et occupé tout entier par une fenêtre sans réseau.
Les adjonctions du gothique tardif
Avant même son achèvement tardif, l’église subissait une modification progressive de son plan initial : construction, du 14ème au 16ème siècles, de chapelles entre les contreforts de la nef; reconstruction d’une nouvelle façade avec tour au 15ème siècle et, enfin, édification du déambulatoire dans le second quart du 16ème siècle. De plan très irrégulier, ce dernier est couvert de voûtes dont les ogives adoptent un tracé plus ou moins compliqué de liernes et de tiercerons (ogives intermédiaires), caractéristique de la fin du gothique.
Inachevée (un porche et une seconde tour était sans doute prévus) et mutilée (la Résurrection qui ornait le tympan du portail a été détruite à la Révolution), la façade est dominée par la haute tour à balustrade – dite tour Saint-Jacques – entreprise vers 1460 dans le style gothique flamboyant et terminée par la construction d’un lanternon à deux étages au 17ème siècle. Une immense baie recoupée par un meneau intermédiaire l’ajoure sur chacune de ses faces.
Le mobilier
Outre ses habillages de marbres et de boiseries, Saint-Jacques a conservé un riche mobilier : nombreuses peintures et sculptures, principalement des 17ème et 18ème siècles, banc d’oeuvre de la Renaissance, balustrade de choeur provenant de la chambre de Louis XVI au château, buffet d’orgue, bénitier roman. Dans une des chapelles sud de la nef, un sacrarium regroupe les nombreuses reliques provenant des églises et couvents de Compiègne (2001).
Chronologie :
Points d'intérêt :
Galerie :
Bibliographie :
- Louis GRAVES, Précis statistique sur le canton de Compiègne, arrondissement de Compiègne (Oise), Beauvais, Achille Desjardins, 1850.
- Comte Arthur de MARSY, "Saint-Jacques de Compiègne, I. Histoire de la Paroisse", Bulletin de la Société Historique de Compiègne, t. 6, 1884, p. 279-282.
- Chanoine Louis PIHAN, Esquisse descriptive des monuments historiques dans l’Oise, Beauvais, 1889, p. 249-265.
- Baron de BONNAULT D’HOUËT, Congrès archéologique de France, 72ème session, Beauvais, 1905, Société française d’archéologie, Paris et Caen, 1906, p. 131-135.
- Jacques PHILIPPOT, Monographie de l’église Saint-Jacques de Compiègne, Paris, 1931, in-8°, 106 p.
- Chanoine DELVIGNE, L’église Saint-Jacques de Compiègne, description et histoire, Compiègne, 1942, in-8, 156 p.
- Claudine LAUTIER et Maryse BIDEAULT, Ile-de-France gothique, Paris, 1987, p. 176-184.
- Dominique VERMAND, Eglises de l’Oise. Cantons de Compiègne. Vallée de l’Oise et Forêt de Compiègne, Comité Départemental du Tourisme de l’Oise et Office de Tourisme de Compiègne, 2001, in 8° de 36 p., p. 15-17 (voir texte ci-dessus).
- Philippe BONNET-LABORDERIE et François CALLAIS, Compiègne et son patrimoine : la ville et la forêt, Groupe d'Etude des Monuments et Oeuvres d'Art de l'Oise et du Beauvaisis (GEMOB), 2002, p. 56-61.
Sites internet :
Documents :
- Extrait de Alphonse de CAYEUX, Charles NODIER et Justin TAYLOR, Voyages pittoresques et romantiques dans l’ancienne France, Picardie, vol. 3, Paris, 1845.
- Extrait de Alphonse de CAYEUX, Charles NODIER et Justin TAYLOR, Voyages pittoresques et romantiques dans l’ancienne France, Picardie, vol. 3, Paris, 1845.