Au coeur de la forêt de Compiègne, Saint-Jean-aux-Bois est l’un des plus beaux villages de l’Oise. Il doit son existence à la fondation en 1152, par la reine Adélaïde, veuve de Louis VI le Gros, d’une abbaye de religieuses bénédictines. En 1634, un échange s’opère avec l’abbaye de Royalieu, dont les chanoines augustins viennent remplacer les religieuses, l’abbaye perdant alors son statut pour être transformée en simple prieuré. Leur départ, en 1761, vaut à l’église de devenir paroissiale, ce qui la sauvera vraisemblablement de la destruction à la Révolution. Disparues à l’exception de deux portes pittoresques, les fortifications de l’abbaye ont laissé leur empreinte dans le plan circulaire du village, les maisons s’étant établies par rapport à leur ancien tracé.
Seul vestige de l’abbaye avec l’ancienne salle capitulaire, plus ancienne (vers 1170), l’église a été construite d’un seul jet dans les années 1220. Elle constitue un magnifique témoignage de l’architecture gothique à son apogée. La netteté de son plan basé sur la juxtaposition de modules quadrangulaires, le dépouillement de ses volumes qu’animent simplement les contreforts et les hautes et étroites fenêtres, la simplicité de sa décoration sculptée enfin pourraient volontiers la faire passer pour une oeuvre cistercienne.
Le plan comprend une nef unique de trois travées, un transept débordant et un choeur de même largeur que la nef et approximativement carré. L’originalité de l’ensemble provient du voûtement sexpartite (à six compartiments) du choeur et de la croisée qui, pour cette dernière, a nécessité l’implantation d’une mince colonne circulaire à l’entrée de chaque bras de transept, auquel on accède ainsi par une double arcade au tracé fortement surhaussé. Ainsi divisés, les deux bras sont couverts chacun de deux petites voûtes quadripartites. D’une très grande élégance, ce parti sera repris au 16ème siècle, mais avec moins de bonheur, à l’église de l’abbaye de Lieu-Restauré, aujourd’hui très dégradée, dans la vallée de l’Automne.
Les retombées des voûtes s’effectuent sur des colonnettes ou des faisceaux de colonnettes par l’intermédiaire de chapiteaux décorés principalement de crochets comme il est d’usage à cette époque. Dans la nef et à l’ogive intermédiaire de la voûte du choeur, toutefois, ce sont de simples culs-de-lampe qui assurent ce rôle, laissant ainsi le mur totalement lisse, un choix sans doute dicté par la présence de stalles aujourd’hui disparues. L’existence d’arcatures aveugles à la première travée de la nef indique que ces stalles commençaient au droit de la travée suivante.
Regroupées en triplet, les hautes et étroites fenêtres qui ajourent le choeur ont conservé des vitraux en grisaille et, pour la fenêtre centrale, une verrière représentant des scènes de la Vie du Christ. Contemporains de l’église, tous ont néanmoins été fortement restaurés.
Très dépouillé, l’extérieur n’accueille de décor que pour souligner l’archivolte des fenêtres d’une moulure ornée de pointes de diamant et la base du toit d’une corniche à modillons variés et tablette ornée de fleurs. D’origine, la rose qui orne la façade ouest a vu toutefois son remplage totalement refait au 19ème siècle. Complété par la suite du portail qui s’ouvre dans le croisillon nord, près d’un tombeau à enfeu du 13ème siècle, l’accès à l’église s’effectuait initialement au sud de la première travée de la nef, en liaison directe avec les bâtiments conventuels (2001).
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Bibliographie :
- Louis GRAVES, Précis statistique sur le canton de Compiègne, arrondissement de Compiègne (Oise), Beauvais, Achille Desjardins, 1850.
- Emile COËT, Notice historique et statistique sur les communes de l’arrondissement de Compiègne, Compiègne, 1883.
- Chanoine L. PIHAN, Esquisse descriptive des monuments historiques dans l’Oise, Beauvais, 1889, p. 285-294.
- Abbé Ed. DANGU, « L’Abbaye et le Village de Saint-Jean-aux-Bois en la Forêt de Cuise », Bulletin de la Société Historique de Compiègne, t. 14, 1911, p. 199-294.
- André PHILIPPE, L’abbaye de Saint-Jean-aux-Bois (1132-1634), étude archéologique suivie de l’obituaire de l’abbaye, Compiègne, 1931.
- Claudine LAUTIER et Maryse BIDEAULT, Ile-de-France gothique, Paris, 1987, p. 311-317.
- Nicolas PETIT, "Les abbayes génovéfaines dans l'Oise : vues et plans retrouvés", Groupe d’Etudes des Monuments et Oeuvres d’art de l'Oise et du Beauvaisis (GEMOB), Bulletin n° 51, 1991, p. 18-21.
- Dominique VERMAND, Eglises de l’Oise. Cantons de Compiègne. Vallée de l’Oise et Forêt de Compiègne, Comité Départemental du Tourisme de l’Oise et Office de Tourisme de Compiègne, 2001, in 8° de 36 p., p. 29-31 (voir texte ci-dessus).
- Philippe BONNET-LABORDERIE et François CALLAIS, Entre rivières et forêts, la communauté compiégnoise, Groupe d'Etudes des Monuments et Oeuvres d'Art de l'Oise et du Beauvaisis (GEMOB), 2005, p. 80-84.
- Erika RINK et Nikolaus BRADE, Kirchenschicksale in Nordfrankreich/Destins d'églises en Picardie, Ernst A. Chemnitz/Mitteldeutscher Verlag, 2006, p. 46-47.